Quatrième de couverture :En plein banquet, à Babylone, au milieu de la musique et des rires, soudain Alexandre s’écroule, terrassé par la fièvre.
Ses généraux se pressent autour de lui, redoutant la fin mais préparant la suite, se disputant déjà l’héritage – et le privilège d’emporter sa dépouille.
Des confins de l’Inde, un étrange messager se hâte vers Babylone. Et d’un temple éloigné où elle s’est réfugiée pour se cacher du monde, on tire une jeune femme de sang royal : le destin l’appelle à nouveau auprès de l’homme qui a vaincu son père…
Le devoir et l’ambition, l’amour et la fidélité, le deuil et l’errance mènent les personnages vers l’ivresse d’une dernière chevauchée.
Porté par une écriture au souffle épique, Pour seul cortège les accompagne dans cet ultime voyage qui les affranchit de l’Histoire, leur ouvrant l’infini de la légende.
Impressions de lecture :
Ecoutez... "dans les steppes de l'Asie centrale "de Borodine, ce rythme d'abord lancinant, répétitif mais qu'on sent évoluer, puis ces voix fortes, discordantes ou assorties, fortes, envoûtantes...Vous aurez un aperçu de mon ressenti sur ce roman : j'ai eu la musique dans la tête pendant toute la lecture...
J'aurais aimé ne pas vous en dire plus, vous laisser trouver votre propre musique...Il y a tant à découvrir par soi-même...Et tant à dire aussi.
Sur l'idée de départ, originale et osée, pas facile : parler d'un personnage très connu (Alexandre le Grand) en se focalisant sur son agonie et son cortège funèbre.
Sur la construction ensuite, tel un roman "choral" certes, où Laurent Gaudé alterne les narrateurs à la première ou troisième personne, mais aussi les types de voix : les vivants, Alexandre, et les âmes errantes des fidèles compagnons morts. Cela donne un côté passionné, flamboyant à l'ensemble. On passe du lyrisme à la réalité la plus dure. On est en empathie totale avec les personnages tels que Drypteis, digne et loyale, et les compagnons fidèles d'Alexandre, qu'on peut compter sur les doigts de la main, et qui formeront son ultime cortège.
"Alexandre doit retrourner à sa mère qui l'attend ,
qui hurlera à son tour, du haut des monts de Macédoine,
et ce cri s'entendra jusqu'aux confins du monde."
Sur l'écriture de Laurent Gaudé, enfin, qui est vraiment sa signature même si elle diffère un peu selon les livres, mais qu'on retrouve dans le soleil des Scorta et plus encore dans la nuit Mozambique ( et dans la mort duroi Tsongor parait-il, je vais donc m'empresser de le lire) :
cette écriture en effet, on peut la trouver "excessive", c'est souvent le reproche, mais qu'elle est belle ! Quel souffle elle donne au récit ! On est porté autant par l'histoire que par l'écriture ! Et c'est d'elle que vient cette musique qui ne vous lâche plus au fil des pages.
(Je mets peu de citations, je crois qu'il est important de decouvrir ces lignes sans a priori...)
Et toujours cette question de la mère d'Alexandre, Olympias, "A qui appartiens-tu, Alexandre ?", fil rouge lancinant du récit et réprésentative d'un des objectifs d'Alexandre le Grand : rallier Occident et Orient, les réconcilier, oeuvre ambitieuse qu'il tentera de mener à bien...Même si l'empire, dès sa mort annoncée, sera l'objet de convoitises et de partages sanglants...
"Tout se fissure dans l'empire. (...) On déchire les alliances et aiguise les fers. Est-ce à cela qu'il lui sera désormais donné d'assister ?
Le dégoût en elle, je le sens. Il monte. C'est lui qui va nous donner la force de nous rejoindre, Alexandre (...) Elle ne le sait pas encore mais ce sera elle qui te ramènera à moi, et je te guiderai alors vers les terres lointaines que tu n'as pas foulées de ton vivant."
J'ai été happée dès la première ligne par le style très lyrique lorsqu'il s'agit des grandes scènes du roman (cortège, Egypte, dernier assaut...), très intimiste lorsque la voix de Dryptéis se fait entendre, et très réaliste dans les anecdotes relatives au règne d'Alexandre le Grand : ces variations donnent beaucoup de relief à la narration.
p.31 : "Elle pense que les dieux ont faim, qu'ils veulent une proie, que personne n'a pensé à calmer leur appétit. C'est bien ce qu'elle a senti. Il flotte dans l'air autour d'eux, une menace. Les dieux cherchent une vie à dévorer.(...) Il est normal que ce soit elle."
En bref, une première page qui vous harponne, une construction qui donne un souffle à l'histoire, une écriture qui lui donne un rythme reconnaissable certes- mais c'est ce que j'aime chez un auteur, sa "signature littéraire"-mais un rythme très musical, grandiose souvent.
Et une histoire prenante traitée de manière oiriginale.
Vous l'avez compris, ce roman est un superbe cru de Laurent Gaudé, que je vous encourage vivement à découvrir en vous laissant porter par le style...
Un seul "oubli" mais on y remédie très facilement de nos jours (!) : une (même minuscule) biographie d'Alexandre le Grand aurait permis de se situer dans le temps, et une carte dans l'espace. ça aurait sans doute ajouté un caractère "roman historique" non voulu au livre d'où peut être le choix de ne pas les inclure...
Note : 19/20
J'avais choisi ce roman pour les matches de la rentrée littéraire chez Price Minister.
Merci à Oliver et aux éditions Actes Sud
pour l'envoi de ce livre.
A cette URL, on trouve une carte très bien, avec possibilité de cliquer sur les villes, apparaissent alors des oeuvres d'art ou photos en relation avec la dite-ville.http://explorethemed.com/AlexanderFr.asp?c=1