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Une minute quarante neuf secondes de Riss

Date de parution : octobre 2019 chez Actes Sud
Nombre de pages : 320

" Il est impossible d'�crire quoi que ce soit. On ne transmet pas une d�sagr�gation. On ne raconte pas un d�litement. "

C'est ainsi que d�bute le t�moignage de Riss, directeur de la r�daction de Charlie Hebdo, survivant de l'attentat du 7 janvier 2015 au cours duquel il a �t� bless� � l'�paule. Une minute quarante-neuf secondes, c'est la dur�e de l'attaque des deux terroristes. 

" Je reprenais le d�compte des derni�res secondes de ma vie :
une seconde, je suis encore vivant. 
Une autre seconde, je suis toujours vivant. 
                                     Encore une autre seconde, je ne suis toujours pas mort."

Outre le r�cit de ce jour fatidique, Riss nous livre ses souvenirs d'enfance, sa prise de conscience tr�s jeune de la possibilit� d��tre confront� un jour � une guerre et � la mort. Il �voque sa rencontre avec Cabu et Charb et ses d�buts dans la presse satirique. " Rire c'est d'abord r�fl�chir ". Il d�crit l'envers du d�cor du journal satirique, ind�pendant, sans publicit� ni subventions, un journal auquel il a consacr� 24 ans de sa vie.

Il raconte �galement l'apr�s 7 janvier, la difficult� � quitter la " coquille protectrice de l'h�pital ", le retour dans la r�daction de Charlie rapatri�e dans les locaux de Lib�ration. Riss est un des deux actionnaires survivants du journal. Tr�s vite il se retrouve face � des requins, des opportunistes qui, une fois les piliers de Charlie disparus, r�v�lent leur v�ritable personnalit� face aux enjeux autour des sommes colossales re�ues par Charlie apr�s l'attentat, il se retrouve face � des membres du journal qui ne parlent que d'actions et de redistribution des actifs. Riss fustige ceux du journal qui se proclament rescap�s alors qu'ils se trouvaient � des centaines de kms des locaux du journal ce jour l� et ceux qui alimentent la presse de commentaires fielleux. Il d�nonce le cynisme, les strat�gies et man�uvres et raconte son combat pour que l'argent r�colt� soit r�serv� exclusivement � l'activit� du journal et non revers� aux actionnaires.

Il y a beaucoup de ressentiment dans ce r�cit, envers certains de ses collaborateurs, � l'�gard de l'�lite intellectuelle et politique "la comp�tence et la connaissance ne sont malheureusement pas toujours synonymes d'audace et de courage " , envers les voleurs de mort qui ont tent� de tirer profit de leur destin tragique. Riss ne m�che pas ses mots pour fustiger ceux qui ont eu un comportement indigne apr�s l'attentat.

Ce r�cit est tr�s diff�rent de celui de Philippe Lan�on qui avait centr� son r�cit sur sa reconstruction. Le t�moignage de Riss, beaucoup moins litt�raire, reprend l'avant 7 janvier 2015 avec ses d�buts, sa rencontre avec Cabu et Charb, la renaissance de Charlie Hebdo en 1992, l'incendie de leurs locaux en 2011 et la publication des caricatures de Mahomet. Il s'�tend sur l'apr�s 7 janvier,  les soins sous une fausse identit� � l'h�pital, la journ�e du 11 janvier pass�e dans sa chambre de l'h�pital o� " il attend le moment o� la mar�e se retirera quand les crabes recommenceront � nous cisailler les mollets ", sa vie sous protection polici�re, sa vie apr�s avoir vu la mort en face, les s�quelles physiques et psychologiques et l'impossible retour � une vie "normale".
Riss a une histoire et une relation diff�rentes de Lan�on avec les victimes auxquelles il �tait li� par un pass� commun et une forte amiti�, il leur rend un bel hommage dans de courts chapitres ins�r�s dans son r�cit, on per�oit toute son admiration pour ses amis dessinateurs de presse ou caricaturistes pour qui dessiner ou �crire dans Charlie Hebdo avait toujours �t� un acte politique. Ces passages all�gent ce texte empreint de douleur, de r�volte et de col�re. Je souhaite que Riss parvienne � retrouver un minimum d'apaisement apr�s nous avoir livr� ce t�moignage honn�te et d'une grande sinc�rit�.


Citations
" De cette salle de r�daction d�vast�e, peut-�tre ne sortirai-je jamais."

" Les bless�s ont du mal � exister. Ils ne sont pas morts et leurs noms ne sont inscrits nulle part. Mais ils ne sont plus les vivants qu'ils �taient avant."

" Il ne sera plus jamais possible de jouer cette farce de la vie qui continue comme avant."

" Au sein m�me de ce pauvre journal, nos peines et nos traumatismes furent contraints � cohabiter avec l'ignoble."

" Il nous a fallu du temps pour retrouver le courage de faire entendre � nouveau notre voix, entre le mutisme des vivants et le silence des morts." 


L'auteur

N� en 1966, Riss rejoint La Grosse Bertha en 1991 o� il rencontre Charb, Luz, Cabu, Philippe Val et toute l��quipe du futur Charlie Hebdo. En juillet 1992, il participe � la reparution de Charlie Hebdo. En 2009, � la suite du d�part de Philippe Val, il partage avec Charb la direction du journal. Le 7 janvier 2015, il est bless� lors de l�attentat contre Charlie Hebdo et devient le directeur du journal. (Sources : �diteur)






Irmina de Barbara Yelin






Quatrième de couverture



Jeune femme ambitieuse, Irmina quitte l'Allemagne pour Londres au milieu des années trente, pour suivre une formation de secrétaire bilingue. Elle y fait la connaissance d'un noir, Howard, et sympathise avec ses aspirations à une vie indépendante. Sa liaison avec lui connaît une fin précipitée, quand la situation politique l'oblige à rentrer à Berlin. Dans

" Cherchez la femme " d'Alice Ferney

chez Actes Sud

Lu dans le cadre du Prix ELLE

Alice Ferney, dans ce très long roman, semble avoir le projet de tout nous raconter de l'itinéraire d'un couple .
 Rencontre , vie , mort du couple , mort des protagonistes.
Bien sûr , le sujet a de quoi passionner -surtout les femmes,en général, hmm - mais il y a aussi de quoi se casser les dents, après que ce sujet ait été traité tant de fois et par les plus grands, non ?
Mais ne soyons pas injuste , le livre commence bien , avec la description à la loupe de la genèse et l'éducation de Serge Korol , l'homme de ce livre ( à qui il est dédié ; serait-il de l'entourage direct de l'auteur ? Ce point est un peu gênant par la suite tant le portrait du dédicataire est sans complaisance )

Alice Ferney démontre d'abord à quel point dans un couple on n'est pas deux mais six ! en comptant les deux couples parentaux d'origine.

 Rencontre, illusions ou aveuglement et dés pipés, semble-t-elle dire :
...Couple heureux sans histoire avec malentendu. Aucun des deux n'a idée de ce qui anime son alliance. Des croyances excessives (Il tient à moi. Je suis unique pour lui), des colères ridicules (Cette femme est dure), des émotions légitimes (Nos enfants sont beaux) s'incorporent à leur histoire.

Et ils furent mariés "à double tour"   (p.251)

Et puis c'est l'amertume de la maturité insatisfaite qui s'empare du beau Serge. 
Sa vie l'étouffe. Alors même qu'il manque d'étoffe -contrairement à Marianne l'épouse qui elle bénéficie d'un portrait flatteur (peut-être un peu trop ? La solidarité féminine semble jouer à fond ! ) 
Marianne est positive , dynamique, créative , dévouée, elle sait trouver son bonheur; elle est attachante et presque agaçante (à la limite de la sainteté, lol) 
Serge est intelligent mais vain ; il a définitivement été gâté par un amour parental démesuré. C'est un monstre d'orgueil. 
C'est là que le bât blesse pour la lectrice que je suis : les forces sont inégales , a-t-on envie de s'exclamer! Serge donnant en permanence de quoi l'accabler, et de plus en plus, au fur et à mesure du déroulement du récit.

Serge s'acharnera sur Marianne avec la plus évidente mauvaise foi afin d'obtenir un divorce qu'elle ne souhaite pas :
Elle connaissait la réponse: elle avait parcouru tout son chemin avec celui-là, elle ne voulait pas d'autre mari.
Tout en elle savait qu'elle ne voulait pas vivre sans Serge.
J'ai conçu mon existence avec cet homme. Je l'ai choisi , il n'a pas de substitut. Il me plaît. Ses défauts, je m'y suis habituée, qui ne sont pas de ceux qui me gênent. J'aime l'idée de lui que je me suis faite à travers le mariage. Jamais je n'ai renié le choix originel. J'aime notre alliance. J'ai passé ma jeunesse avec lui, je me la rappelle trop pour vivre la maturité avec un autre. C'est avec lui que j'aime mes souvenirs. Avec lui que je peux me les remémorer. Vieillir sous le regard d'un homme qui a connu ma fraîcheur me sera moins cruel. Je pense sans le craindre à l'avenir avec lui. J'espère que l'un tiendra la main de l'autre à l'instant de mourir. Ma tombe sera la sienne. J'élève avec lui trois enfants. Lui seul peut m'écouter en faire l'éloge. Je partagerai sa descendance. J'aime vivre avec lui. J'y suis habituée. Ce n'est pas un argument péjoratif, la saveur de l'habitude est grande et rassurante. J'ai besoin de lui. Ma vie sans lui ne serait pas la mienne. Désormais il existe entre nous une appartenance : je lui appartiens et il est une part de moi-même. J'ai offert à ce compagnon mon attention et mon élan, mon temps et le cadre de mes jours. J'ai déposé à ses pieds ce qui fait de moi ce que je suis. Je n'aurai pas d'autre mari. Il y a dans ce qui me lie à lui quelque chose d'irrémédiable autant que d'irremplaçable. Je ne sais pas l'imaginer avec une autre femme. Je ne peux m'imaginer avec un autre homme. Un autre serait une rencontre , une découverte, un éblouissant moment peut-être, mais jamais ce chemin qui va du commencement à la fin. Parce que le commencement a déjà eu lieu , et c'est avec Serge que je l'ai joué.


Voilà , si cette mystique de l'amour conjugal vous indispose , passez votre chemin !
Sinon, vous trouverez de belles pages dans ce (très, trop ?) long ouvrage.
De belles études de caractère en particulier (la "monstrueuse" mère de Serge)

J'ai lu cinq livres d'A.Ferney , dont ce dernier, et je dois dire que je trouve son oeuvre inégale ; mon préféré reste incontestablement "l'élégance des veuves" , qui porte bien son nom.

Alice Ferney a quelque chose de démodé qui fait son charme mais aussi sa limite .
C'est d'un univers un peu bourgeois, dans le fond, ou tout au moins très classique (comme son écriture d'ailleurs) qu'elle parle. 
Ses couples ont peu à faire avec l'époque contemporaine, alors on aime ...ou pas .
Bien sûr elle veut se placer sur le plan de l'éternel de l'amour,et elle y réussit mais en partie seulement.
J'ai été surprise et déçue, par exemple, que dans son souci d'entomologiste elle ne consacre pas la moindre attention à l'univers sexuel de "son" couple. Une seule page décrit Marianne dans l'amour, et cette page est fort belle. 
Pourquoi passer sous silence cet aspect de la relation, pourtant si crucial en vérité ?
 Il y a là une pudeur qui me semble à la limite du coincé, et qui minore l'intérêt de la démonstration "totale" promise. 
La parentalité est évacuée également assez vite ; et pourtant quelle incidence dans l'histoire des couples au long cours , quelles transformations exige-t-elle ...

Le livre est souvent redondant, l'analyse fine , le style un peu lourd (aucun humour mais un certain sens du tragique) le fond du propos assez noir (nous ne faisons pas de "vrais" choix mais sommes bringuebalés par des affects ne nous appartenant parfois même pas en propre) . 
Pas franchement réconfortant ?
A vous de voir !



Une note pour ELLE : 13 (assez bien)


MIOR.

"Un été sans les hommes " de Siri Hustvedt


J'ai profité de l'édition au format poche (Babel) pour ce livre dont le titre semble un clin d'oeil, et l'image de couverture charme.

Sur une trame assez usée (crise de milieu de vie, mari qui tente une aventure comme on fait une sortie) Siri Hustvedt tisse un récit qui se lit avec intérêt:
 Mia, son personnage principal, vit "un été sans les hommes" , bien involontairement au départ, puis avec de plus en plus de profit.
Réfugiée dans la ville de province bien terne où elle a passé son enfance, elle va animer un atelier-poésie (elle est écrivain) auprès d'une demi-douzaine de jeunes filles, et rencontrer les amies de sa mère , octogénaires "pêchues" et assez malicieuses avec qui elle va lier amitié, en se joignant aux réunions de leur club de lecture.

 C'est dans cet aspect transgérénationnel que réside à mon sens l'aspect le plus intéressant de l'ouvrage.
 Mia s'ouvre à tous les âges de la femme,elle qui n'a pas oublié l'ado qu'elle fut et commence à penser à la vieille dame qu'elle sera.

Et puis , elle cogite, elle ressasse,elle cherche à démêler l'écheveau de ses sentiments conjugaux, entre rancune et attachement irréfutable. C'est une relecture de sa propre vie.
Cet été marquera une pause dans son trajet, pour reprendre l'image lâche de son époux...



Il est impossible de deviner l'issue d'une histoire pendant qu'on la vit; elle est informe, procession rudimentaire de mots et de choses, et, soyons francs: on ne récupère jamais ce qui fut. La plus grande partie en disparaît. Et pourtant, comme je m'efforce, assise ici à mon bureau, de le faire réapparaître, cet été pas tellement lointain, je sais que des tournants ont été pris qui ont affecté la suite. Certains ressortent comme des bosses sur une carte en relief, mais j'étais alors incapable de les percevoir parce que ma vision des choses se perdait dans la platitude monotone d'une vie vécue au jour le jour. Le temps n'est pas extérieur à nous, il est intérieur. Seulement nous vivons avec le présent, le passé et le futur, et le présent est trop bref, de toute façon, pour être reconnu comme tel; il est conservé après coup, et alors soit il est codifié, soit il glisse dans l'amnésie. La conscience est le produit du recul  

En résumé, un livre que j'ai lu vite et avec plaisir, mais rien de comparable avec le choc qu'avait été pour moi la lecture du "Tout ce que j'aimais" du même auteur, puissant , envoûtant, effrayant. 

Mior.

Faux pas de Maria Adolfsson (Doggerland 1)

Quatri�me de couverture C�est le lendemain de la grande f�te de l�hu�tre � Heim?, l��le principale du Doggerland. L�inspectrice Karen Eiken...