Robert Louis Stevenson, Le Creux de la vague, traduit de l’anglais par Jean-Pierre Naugrette, paru en 1894, écrit en collaboration avec Lloyd Osbourne.
Un très bon roman de Stevenson, sans doute un des meilleurs.
Au début de l’histoire, nous sommes à Papeete, dans un territoire de rêve, mais en compagnie de trois hommes réduits à la misère : Huish un homme un peu frustre et sans scrupule, Davis un ancien capitaine oscillant entre brave homme et gredin et Herrick, ancien étudiant déchu, à qui sa situation fait horreur. La situation n’est pas très brillante, mais bientôt s’offre une opportunité : un bateau à conduire à Sydney, une nouvelle traversée, un lagon inconnu et paradisiaque et un homme étrange et fascinant.
Il avait épousé le creux de la vague dans les affaires des hommes, et la vague l’avait emporté au loin ; il entendait déjà mugir le maelström qui devait l’envoyer par le fond. Et dans son âme harcelée et déshonorée il n’y avait aucune place pour lui-même.
C’est à la fois un roman d’aventures sous les tropiques particulièrement réussi et un roman d’introspection très fin. Pas de temps mort, les rapports de force entre personnages sont très vivants, des passions fortes sont mises en scène. Il y a la magie des perles rares et le sentiment d’être perdu au bout du monde, dans un monde sans foi ni loi. Herrick est le représentant de l’auteur dans ses angoisses et sa sensibilité, dépassé par la situation mais s’efforçant d’y faire face. Mais c’est surtout le décor qui fait la force du livre : Papeete en proie à la maladie et à la déliquescence, le lagon à la nature mystérieuse et inconnue, d’une beauté surréelle.
L’île tremblait devant eux comme un lieu incandescent ; à la surface du lagon des soleils de cuivre aveuglants, pas plus gros que des pièces de dix sous, dansaient en leur transperçant les prunelles ; il montait du sable et de la mer, et même du canot, une lumière d’une clarté cinglante ; et comme ils ne pouvaient scruter le lointain qu’en joignant les cils, l’excès de luminosité parut se muer en noirceur sinistre, comparable à celle d’un nuage avant l’orage.
La description de l’île est impressionnante, c’est un lieu de beauté absolue, de paix, d’harmonie céleste et l’enfer des hommes blancs. La brutalité de la beauté.
Bon pour le challenge victorien.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire